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On reconnaît bien là le style et les idées du temps. Parmi les toasts portés à ce banquet, figurèrent les suivants : À la Révolution de France ! À la Révolution de Pologne ! À l’abolition du système féodal ! À la liberté de la presse ! À la liberté civile et religieuse ! etc. C’étaient les principes de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui passaient l’Océan et qui soulevaient dans la ci-devant Nouvelle-France les mêmes acclamations qui les avaient salués dans la France continentale.

La propagande des idées de la Révolution française avait, en effet, pénétré jusqu’aux extrémités du fleuve Saint-Laurent et éveillé dans plus d’un esprit des idées et des espérances nouvelles. Mais le clergé catholique, qui, depuis 1763 et par suite du retour en France de presque toute l’aristocratie et la bourgeoisie coloniales, avait pris la direction du parti français au Canada, s’unit, en cette occasion, comme il l’avait fait pendant la guerre de l’Indépendance, à l’administration anglaise pour combattre et étouffer ces premiers germes de l’esprit de liberté et d’égalité. Le curé de Québec, l’abbé Plessis, prononçant l’oraison funèbre de l’évêque Briand, se faisait, sans vergogne, l’interprète de ces sympathies nouvelles qui le jetaient dans les bras de l’Angleterre par crainte des idées révolutionnaires et peut-être aussi par l’espoir de coiffer la mitre épiscopale. « Nation généreuse, s’écriait-il, nation industrieuse qui avez fait germer les richesses que cette terre contenait dans son sein ; nation exemplaire qui, dans ce moment de crise, enseignez à l’univers attentif en quoi consiste cette liberté après laquelle tous les hommes soupirent et dont si peu connaissent