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ter, allant du golfe Saint-Laurent aux grands lacs et au-delà. Le Nouveau Brunswick actuel, le Haut et le Bas-Canada, la partie septentrionale des États du Maine, de Vermont, de New-York, tout ou partie des États actuels de l’Illinois, du Michigan, du Ouisconsin, le Manitoba et les territoires du Nord-Ouest restaient virtuellement dans les limites de cet État. Croit-on que les Américains eussent songé à s’établir dans ces vastes solitudes, parcourues jusqu’alors par les seuls pas des Indiens et des Français, quand plus près d’eux, dans l’ouest, sous un climat moins rigoureux, tant de terres restaient à défricher, tant d’espaces à conquérir ? Non, les Canadiens restaient bien les maîtres chez eux, grâce aux prérogatives et à l’autonomie très étendues dont jouissent les États de l’Union, maîtres de s’administrer à leur guise, maîtres de leurs institutions, maîtres de leur vaste sol, maîtres d’y projeter dans toutes les directions des colonies filles et prolongements de la leur. Leur langue ne courait pas le danger qu’elle a couru depuis par suite d’un mélange trop intime avec les éléments anglais. Les Canadiens eussent été stimulés non absorbés par leurs confédérés américains. Plus tard des États nouveaux se fussent formés sans doute du partage de l’État primitif devenu trop grand et trop peuplé ; mais ces fragments eussent reproduit l’esprit, gardé la langue et les institutions du corps primitif. Les communications avec la vieille France eussent été d’ailleurs plus faciles, plus régulières et plus suivies. La Révolution française qui fut incomprise ou honnie par les Canadiens, eût été une occasion de rapprochement par la similitude des institutions. La France, alliée constante de la République américaine, eût couvert de sa protection morale cet