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tume de Paris qui formait, avant la conquête, le code général de la colonie. D’autres articles assuraient aux catholiques le libre exercice de leur religion et les dispensaient du serment du « Test »[1]. L’Acte reculait les limites dans lesquelles on avait circonscrit précédemment la province de Québec. Il établissait enfin un « Conseil législatif », nommé il est vrai, par la couronne, et dont les membres (17 au moins, 23 au plus) pouvaient être choisis indifféremment parmi les protestants ou les catholiques.

Ce bill passa, mais non sans une vive opposition de la part de plusieurs membres du Parlement anglais qui étalèrent à cette occasion cette morgue naïve et cet égoïsme national qui ont si souvent caractérisé les procédés et la politique de nos voisins. Ainsi les partisans du bill ayant fait observer qu’il n’y avait, au Canada, que 3,000 Anglais contre plus de 100,000 habitants d’origine française[2], quelques orateurs prétendirent que le nombre, en pareil cas, n’était pas à considérer. Burke prononça même, à ce propos, les vaniteuses et sottes paroles suivantes : « Un vieux proverbe dit qu’un Anglais a toujours valu deux Français. Je crois que, dans le cas actuel, cinquante Français valent à peine un Anglais. » Ce n’est pas aux vainqueurs de Fontenoy, de Carillon et de Sainte-Foy, aux défenseurs de Montréal et de l’Île-aux-Noix que ces expressions injurieuses

  1. Voir note, page 289.
  2. La population canadienne française, s’élevait, en effet, en 1774, au chiffre approximatif de 100,000 habitants. C’était déjà un accroissement considérable sur les chiffres de 1760 et un nouveau trait de cette multiplication prodigieuse de la population sur laquelle nous aurons plusieurs fois occasion de revenir.