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la saluâmes aussi respectueusement qu’une déesse bienfaisante et nous sortîmes.

Montencon me dit : « Je vous rends grâce ; je serais plus glorieux d’être son père que celui de la reine Marie-Antoinette. Elle est autant au-dessus des fouteries ordinaires que mademoiselle Contat ou mademoiselle Lange sont au-dessus d’une putain des pauvres qui branle les vits derrière les charrettes sur le quai du Louvre !… »

Nous nous séparâmes à ces mots. « Ah ! disait Montencon en s’éloignant, comme elle a été foutue ! »




CHAPITRE XXI.

Du ressouvenir de l’épisode.

Ah ! que les puristes ont dû se récrier au chapitre précédent !… Eh bien, puristes, je m’en fous !

Le lendemain, je m’attendais à un peu de bouderie ou de sérieux, non, ma Conquette me parla comme à l’ordinaire… Je fus huit jours sans chercher à le lui mettre. Le samedi, son bijou, bien rétabli des fatigues données par Sourcilsgris, dit Montencon, elle y sentit un chatouillement ; elle se ressouvint alors de ce que je lui avais dit, qu’elle pourrait se laisser enconner par Timon. Elle fit une toilette de volupté, se couvrit d’une calèche et sortit le soir. Mais je l’observais et la faisais soigneusement observer par madame Brideconin, ou, comme je l’appelais en riant, madame Conbridé. Je fus averti, je la suivis pour la préserver de malheur ; elle monta, j’écoutai à la porte, et j’entrevis