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enfans. Sophie, la plus jolie et d’un esprit vif, avait une voix céleste et des yeux superbes. La princesse de Modène, qui faisait sa retraite au Val-de-Grâce, fut frappée de la beauté d’une voix qui chantait une leçon de ténèbres. Le salut de la princesse fut la cause de la perdition de la jeune Arnould. L’intendant des Menus Plaisirs, après avoir entendu la jeune virtuose, trouva le moyen, malgré le père et la mère, de la faire entrer dans la musique du roi, route honnête pour mon ter sur le théâtre de l’Opéra. Sophie Arnould réalisa bientôt la prophétie de madame de Pompadour, qui dit, après avoir vu et entendu Sophie : « Il y a là de quoi faire une princesse. » Sophie s’éleva rapidement, parla beauté de son chant, ses grâces, son esprit, et par l’éclat de ses amours, à la dignité de reine de l’Opéra. Elle trouva le moyen, dit-on, d’avoir les profits d’une fille, les succès d’une grande actrice, et la réputation d’une femme d’esprit. Elle dépensait avec une égale profusion sa jeunesse, ses saillies et les largesses de ses amans. Sophie a ruiné beaucoup de grands seigneurs. On a fait un recueil des bons mots de Sophie Arnould. Une de ses amies se plaignait devant elle d’approcher de trente ans, quoiqu’elle en eût davantage : « Console-toi, lui dit-elle, tu t’en éloignes tous les jours. » Un fat, pour la mortifier, lui disait : « À présent l’esprit court les rues. — Ah ! monsieur, dit Arnould, c’est un bruit que les sots font courir. » Elle rencontra au bois de Boulogne son médecin qui allait voir un malade, avec un fusil sous le bras. « Docteur, lui cria-t-elle, il paraît que vous avez peur de le manquer. » Une grande dame disait près d’elle au spectacle : « On devrait bien distinguer les femmes honnêtes par des marques honorables. — Madame, lui dit Sophie Arnould, pourquoi