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LE RÉPERTOIRE NATIONAL.

présenter au lecteur que des nœuds sans intérêt. En assimilant trop les idées divines aux idées humaines, il tombe nécessairement en contradiction avec nos propres idées. En effet, ne semblerait-il pas ridicule, au premier coup d’œil, de faire manger, boire et digérer des êtres célestes, esprits par essence ; de faire camper l’armée de Dieu en face de celle des démons ; de supposer des fortifications aux cieux, etc., etc… Tout ceci a je ne sais quoi d’extravagant qui répugne, et qui serait insupportable, si tout autre que le divin Milton eût tenté d’en faire usage.

Il paraîtra peut-être singulier qu’un essai sur un tel sujet soit présenté aux yeux de public par des personnes qui pourraient dire avec raison, ce que disait à Laharpe le jeune Luce de Lancival : « Maître, pardonnez à la témérité d’un jeune athlète, qui, pour s’exercer au combat, se sert des armes d’Hercule, dont le poids seul lui permet de s’avancer dans l’arène. » Si nous n’avons pas fait de remarques sur la totalité de chaque livre, ce n’a été que par défiance de nos propres forces, et la considération de l’espace immense qu’il y a de Milton à nous. Nous ne nous sommes attachés qu’aux traits les plus saillants, et sur lesquels nous avons pu prononcer un jugement en toute sûreté.


LIVRE PREMIER.


Milton commence par l’invocation. Son début est plein de feu et de majesté ; ses allusions pleines de justesse, et conviennent parfaitement au génie de l’auteur.

Il s’enquiert ensuite des causes qui ont fait le malheur de l’homme et décrit Satan d’une manière admirable ; mais ce vers :

…hope never comes
That comes to all…


est contredit par le poème même, puisque Satan se nourrit continuellement du fol espoir de renverser Dieu. Il règne une énergie marquée dans la description de l’état où se