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Laure, elle était délicieuse. Elle portait une robe de soirée, décolletée. C’est la première fois que je vois ses épaules nues. Après dîner, Antoine lui a fait de vifs compliments sur sa toilette. Elle a ri et s’est retournée vers moi d’un air tendre.


6 juillet. — Gernon s’est enfermé dans sa cabine pour préparer un article de revue. Les Subagny sont allés avec Antoine au Polo. Mme Bruvannes est restée à lire. Mme de Lérins et moi, nous sommes partis pour faire une promenade dans l’île.

On trouve à La Valette d’amusantes petites voitures couvertes d’un toit de toile, avec des rideaux que l’on ouvre ou ferme à volonté, et dont les chevaux vifs et nerveux grimpent allègrement la pente roide qui conduit du port à la ville. Elle est curieuse, cette ville, avec ses grandes « auberges », ses boutiques, à la fois très italiennes et très anglaises. Les Maltaises y portent encore la bizarre coiffure nommée « faldetta » qui leur enveloppe la tête comme d’une conque d’étoffe. Ce fut à travers ces rues que nous gagnâmes l’antique poterne par où l’on sort de La Valette.

Cette poterne s’ouvre dans les murailles qui, de ce côté, dominent un profond ravin. Aussitôt nous voici en pleine campagne. Le paysage est d’une assez sèche aridité. Au loin, la mer étincelle sous le soleil. Nous avons laissé le cocher libre de diriger notre promenade. Il nous a annoncé, en mauvais anglais, qu’il nous menait à San Antonio.