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ma mère, à Clessy-le-Grandval. J’y ai retrouvé, une fois de plus, l’existence que j’y mène à chacun de mes séjours.

À Clessy, je loge toujours dans la même chambre. Elle est assez grande et située au second étage de la maison. Une grosse poutre, dissimulée sous une couche de plâtre, traverse en saillie le plafond. Les murs sont tapissés d’un papier à fleurs sur fond blanc. Ce fond, d’ailleurs, n’est plus très blanc et les fleurs ont quelque peu pâli. Quant au sol, il est carrelé, et le carrelage est d’un rouge éteint dont l’effet n’est nullement désagréable à l’œil. Le lit, placé, à l’ancienne mode, dans une alcôve, est de style Empire, mais d’un Empire de campagne, sans bronzes. Les seuls ornements sont, au sommet des quatre colonnettes d’angle, quatre petites urnes à l’antique, en bois d’acajou. La literie est excellente et douillette. L’édredon, bien gonflé, est rempli de plumes d’une heureuse mollesse. La toile des draps est très fine, très usée et sent bon la lessive. De ces draps-là, on n’en trouve plus qu’en province, chez les vieilles gens. De même que l’on ne voit plus guère qu’en province des pendules comme celle que supporte la cheminée. Elle est d’albâtre en forme de borne, avec un cadran doré. Elle a l’air d’être en sucre, mais, dans sa fadeur douceâtre, son timbre résonne avec une maigre petite voix aigrelette. C’est une vraie pendule de vieille fille.

Ce que j’aime le mieux de cette chambre ce sont ses fenêtres. C’est vers elles que je me tourne, quand