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dont j’ai été accusé par mon adversaire[1]. — Me le donnez-vous, répondit Henri II. — Oui, sire, pourvu que vous me teniez homme de bien. — Vous avez fait votre devoir, reprit le monarque, et votre honneur vous est rendu. — Après cela le vainqueur fut conduit par les héraults à l’église de Notre-Dame, où il rendit grâces à Dieu et fit appendre ses armes. Cependant Lachataigneraie, honteux de sa défaite, déchira les bandages qu’on avait mis sur sa blessure, et mourut peu de jours après. Henri II fut si fâché de sa mort qu’il jura solennellement d’abolir le duel judiciaire, et en effet il n’y en eut pas d’autre depuis lors.

L’expression de coup de Jarnac a été sans doute popularisée par ce duel, mais en a-t-elle tiré réellement son origine ? Il paraît qu’elle a existé antérieurement pour désigner le coup d’une espèce de poignard nommé jarnac, peut-être parce qu’il était fabriqué dans la ville de Jarnac, comme un autre poignard, dont le manche s’adapte au bout du fusil, a été nommé baïonnette de la ville de Baïonne où il a été inventé.

jarnicoton.

Jarnidieu ou je renie Dieu, était autrefois un juron très usité dans certains moments d’impatience et de colère. Henri IV l’avait souvent à la bouche. Le père Coton jésuite, son confesseur, l’engagea à se défaire de cette mauvaise habitude, et voyant qu’il y retombait toujours : Sire, lui dit-il, s’il vous faut absolument renier quelqu’un, reniez tout autre que Dieu ; reniez-moi plutôt. — Eh ! bien, soit, répondit le prince ; je dirai désormais je renie Coton. Il tint parole, et ce nouveau juron passa dans le langage populaire sous les termes corrompus jernicoton et jarnicoton.

  1. Jarnac, qui dépensait beaucoup, quoiqu’il n’eût qu’un faible patrimoine, était soupçonné de devoir l’opulence dont il fesait parade aux libéralités de sa belle-mère, qui avait pour lui une tendresse plus que maternelle ; et Lachataigneraie avait eu l’indiscrétion de dire que la chose était vraie, d’après une confidence qu’il prétendait avoir reçue de Jarnac, lorsqu’ils étaient tous deux intimes. C’est ce qu’on voit dans les pièces mêmes du cartel qui ont été conservées.