Page:Quitard - Dictionnaire des proverbes.pdf/407

Cette page a été validée par deux contributeurs.
387
FÈV

il ordonne qu’on allume du feu devant lui, il y fait rougir une de ces grandes cuillers de fer dont les Arabes se servent pour faire brûler le café, il la retire, en lèche L’extrémité supérieure des deux côtés, la remet ensuite dans le brasier, commande à l’accusé de se laver d’abord la bouche avec de l’eau, et puis de lécher, comme lui-même l’a fait, le beschaa (c’est le nom donné au fer rouge). Si l’accusé n’a pas la langue brûlée, il gagne sa cause ; dans le cas contraire, il la perd. Du reste, ce n’est pas au protecteur tout-puissant de l’innocence que les Arabes attribuent le succès de celui qui échappe à cette dangereuse épreuve ; c’est au diable qu’ils en font honneur, et ils citent tel individu qui par la grâce du diable a léché vingt fois le beschaa sans en éprouver aucun mal.

Dans la Dalmatie, on trouve aussi de rusés fripons qui bravent impunément le contact du fer rouge et de l’eau bouillante dont la superstition admet encore l’usage en ce pays. Ils ont pour cela, sans doute, le même secret que les jongleurs dits incombustibles. Selon toutes les probabilités, un pareil secret dut être connu dans l’antiquité ; plusieurs faits historiques attestent qu’il le fut dans le moyen âge, entre autres, celui de l’épouse de l’empereur Henri II, la princesse Kunégonde, qui marcha sur des socs rougis au feu, et n’en souffrit pas la moindre atteinte. Une ordalie si contraire à la raison ne se serait pas maintenue peut-être pendant tant de siècles si quelques thaumaturges, en possession des moyens de s’y exposer sans danger, n’en eussent fait l’objet de leur industrie clandestine. C’est par le savoir-faire de certains hommes influents plutôt que par l’ignorance du peuple que les abus se sont perpétués de tout temps.

fève. — C’est le roi de la fève.

Au propre, c’est celui à qui est échue la fève du gâteau qu’on partage dans les familles, la veille ou le jour de la fête de l’Épiphanie. Au figuré, c’est un chef sans autorité. La cérémonie du roi de la fève paraît être dérivée des repas des saturnales, où les convives se partageaient, dit-on, un gâteau, tiraient au sort la royauté du festin, et saluaient celui qui en était investi en criant : Phœbe domine, comme on crie aujourd’hui : Le roi boit.