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arrangées. Ce noble usage cessa dans le siècle suivant. Les barbiers redevinrent nombreux et puissants. On sait la grande fortune d’Olivier-le-Daim, barbier de Louis XI ; on sait aussi comment il expia son élévation. Ce misérable fut pendu comme l’avait été Labrosse, et tous les deux l’avaient bien mérité.

François Ier, qui aspirait à tous les genres de gloire, n’oublia pas celle de la barbe, honteusement négligée après Philippe de Valois. Les détracteurs de ce roi chevalier ont prétendu qu’il ne laissait croître la sienne que pour regagner en poils ce qu’il avait perdu en cheveux, depuis qu’un tison lancé d’une fenêtre par le capitaine de Lorge, comte de Montgommery, lui avait endommagé le crâne ; mais il est certain qu’il agit ainsi par un autre motif. Il sentait toute la valeur de la barbe, et, ce qui le prouve sans réplique, c’est qu’il fit vendre le droit de la porter. Une ordonnance rendue par lui, en 1533, envoyait ramer sur les galères les Bohémiens, les vilains, et tous ceux qui oseraient la porter sans y être autorisés et sans payer la redevance imposée. Il est vrai que la barbe dont il est question n’était pas une barbe roturière. Elle était une prérogative du costume de cour, et elle équivalait à un titre de noblesse.

Sous Henri IV, on vit paraître des barbes de toutes les espèces. Il y en avait de façonnées en toupet, en éventail, en feuille d’artichaut, en queue d’hirondelle. Mais aucune d’elles ne valait la barbe grise du bon Béarnais sur laquelle le vent de l’adversité avait soufflé. Ô la plus vénérable des barbes ! maudite soit la langue qui ne proférera pas tes louanges !

Quel dommage qu’un aussi grand roi que Louis XIV n’ait pas eu pour la barbe les mêmes égards que pour la perruque ! C’est un des plus grands reproches qu’on puisse lui adresser.

Tel fut le sort de la barbe chez les principales nations. Il serait trop long de raconter celui qu’elle éprouva chez les autres. Je dirai cependant qu’aucun peuple n’eut jamais pour elle un plus grand amour que les Espagnols et les Portugais. C’était une passion qui conservait quelquefois sa force après le trépas. Je n’exagère point. Voici ce que don Sébastien de Cobarruvias raconte à ce sujet : « Cid Rai-Dios, gentilhomme cas-