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artichaut. — Faire d’une rose un artichaut.

C’est faire d’une belle chose une laide, d’une bonne une mauvaise. On dit aussi dans le même sens, Faire d’une pendule un tourne-broche.

Allusion à l’histoire d’un barbouilleur chargé de peindre une rose pour enseigne sur la porte d’un cabaret ; il mit tant de vert-de-gris dans le fond de ses mélanges, que les teintes légères du rouge furent absorbées, et la rose en séchant devint un artichaut.

asperges. — En moins de temps qu’il n’en faut pour cuire des asperges.

Cette expression proverbiale et comique, employée par Rabelais (liv. v, ch. 7), est traduite de l’expression latine : Citiùs quàm asparagi coquuntur. Érasme, qui la rapporte dans ses Adages, observe qu’elle était familière à l’empereur Auguste.

assez. — Il n’y a point assez, s’il n’y a trop.

Ce proverbe, qu’on exprimait autrefois d’une manière abrégée qui prêtait à l’équivoque, Assez n’y a, si trop n’y a, renferme une observation morale d’une grande vérité : c’est qu’on forme sans cesse des désirs immodérés. Les grands enfants, qu’on appelle les hommes, ressemblent à ce petit enfant gâté qui, invité à fixer lui-même le nombre des hochets qui devaient lui être donnés, ne répondait que par ces mots : Donnez-m’en trop.

Sénèque écrivait à Lucilius (épit. 119) : Quod naturæ satis est homini non est ; inventus est qui concupisceret aliquid post omnia. Ce qui suffit à la nature ne suffit point à l’homme ; il s’en est trouvé un (Alexandre-le-Grand) qui, maître de tout, désirait quelque chose de plus que tout.

Les Yolofs, habitants de la Sénégambie occidentale, disent : Rien ne peut suffire à l’homme que ce qu’il n’a pas.

Beaumarchais a très spirituellement enchéri sur notre proverbe, lorsqu’il a mis dans la bouche de son Figaro, parlant de l’amour, ce mot charmant qui est aussi devenu proverbe : Trop n’est pas assez.