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apportez-moi dans ma corbeille les beaux cadeaux de noce que le maître m’a donnés ; mes acanthes cueillies dans le cœur du rocher, mes urnes funéraires qui s’entassaient si vite dans la maison du potier, mes siècles de génie, et mon histoire entière toute vidée d’une fois dans ma coupe d’albâtre. Pour me faire plus belle que les autres, ramassez dans mon buisson trois anémones, et mettez-les à mes cheveux. à présent, déliez mon vaisseau ; levez l’ancre à mes montagnes flottantes, à mes sommets de marbre, à mes îles qui se balancent au vent, à mes champs de batailles, à mes bois de citronniers, à mes rives enflammées, à mes sentiers usés par mon chariot, à tous mes souvenirs pour que j’aborde avec eux dans la vallée de Josaphat.



A cette heure, amenez, amenez la voile ! Ma barque est si petite, et la mer est si grande !



L’Ange du Jugement.

Réveillez-vous, réveillez-vous.



Rome.

Encore un jour, je vous prie. Je cherche dans ma poussière mes habits pour m’habiller, sans les pouvoir trouver. Bel ange, dites-moi, quelle robe mettrai-je pour mieux plaire au seigneur ? Sera-ce ma tunique de Sabine quand j’étais jeune fille, et que je filais sur ma porte le lin de mes jours à venir ? Faut-il prendre à ma main mon livre de prêtresse, mon manteau d’étrurienne, ou ma couronne sanglante quand j’étais reine assise sur une gerbe de blé mûr ? Faut-il tirer mon épée rouillée pendant dix ans dans mon lac de Trasymène, ou renouer à mes reins ma ceinture d’affranchie, ou faire sécher à ma fenêtre mon manteau empourpré jusqu’à la lisière dans le sang de mes empereurs ?



L’Ange.

N’as-tu pas une meilleure parure pour la fête ?