Page:Quinet - Œuvres complètes, Tome VIII, 1858.djvu/129

Cette page n’a pas encore été corrigée

et cette poussière d’or jetée à pleines mains aux yeux de l’univers, n’étaient que faux aloi ; aujourd’hui le secret est connu.

Dans nos creusets chimiques nous en faisons autant : pour trois jours, donnez-moi dans ma chaudière le firmament, terre, ciel, matière, esprit, science, gloire, amour, et quatre grains de carbonate, après trois jours, il restera au fond un feu follet et un peu de lie couleur de ma figure.

D’ailleurs, en tout, le commencement est difficile ; et l’Orient, qui ouvre la vie humaine, est un début du créateur qui mérite indulgence. Avouons-le, la main de notre divin maître tremblait et cherchait ses idées, quand il mettait des milliers d’années à pétrir une nation, et qu’il s’arrêtait à l’ombre, en égypte ou dans l’Inde, le temps de faire quatre mondes. Que de siècles perdus à planter pesamment deux ou trois peuples hâlés dans cette boue du Nil, à balbutier toujours la même idée, en hiéroglyphes, en pierre ciselée, en villes murmurantes, comme un ange novice qui s’arrête dès le milieu de son verset, en comptant ses syllabes une à une, avec son archet sur ses doigts !


Et puis, par un beau jour, quand il a pris tous les visages des religions de l’Orient, et qu’il a dit sans sourciller : avec l’épervier de Thèbes, je glapis ; avec la licorne de Perse, je bondis ; avec la colombe de Chaldée, je roucoule ; avec le crocodile, je brame ; avec le sphinx, je m’accroupis ; n’avons-nous pas cru tous, mes frères, que l’éternel, devenu fou, jouait une divine comédie, dont il était l’unique personnage ? Rôle merveilleux, sur ma parole, artiste accompli, s’il eût été moins ampoulé dans Babylone et dans la terre d’égypt