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SOUVENIRS AUTOBIOGRAPHIQUES

nom domestique, que nous lui avions donné et qu’il avait gardé ; il le tenait d’un incident de son enfance) l’était au suprême degré. Grand lecteur, il avait lu tout ce qui offrait un intérêt général dans la langue maternelle, et il se rendait fort bien compte du degré de ridicule qui s’attachait de notre temps à ces fantômes, mais cela, non plus que les respect, qu’il professait, d’ailleurs, pour les auteurs qui avaient, eux aussi, trouvé cela ridicule, n’avait nullement ébranlé sa croyance à leur existence, pas plus que le marin ne cesse de trouver quelques vertus au rhum et au tabac, alors même qu’il vient d’écouter avec une soumission réellement religieuse, les admonestations de son conseiller spirituel, touchant les plaisirs faux ou trompeurs des choses superflues. Même son expérience, si invincible, si indiscutable, les rudes réalités du plaisir et de la douleur dispersaient les arguments dont l’ancre n’avait mordu que sur son intelligence. Pink, lorsqu’il discutait ce sujet avec moi, voulait bien admettre qu’on pût avoir des doutes sur la réalité des fantômes dans notre hémisphère, mais, disait-il « dans l’hémisphère austral, c’est une autre affaire. » Alors il se mettait à me raconter des choses terribles qu’il avait vues et éprouvées lui-même, à me parler d’une apparition qui s’était renouvelée bien des fois, et qui avait été examinée à dessein et en vain par des groupes d’hommes qui communiquaient entre eux par des signaux convenus, dans une des îles Galapagos. Ces îles qui ont été visitées, et je crois aussi, décrites par Dampier, qui

    que le décrit l’auteur, ce n’est point un surnom insignifiant, comme le sont souvent ceux qu’on se donne dans une famille. (Note du Traducteur).