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DU MANGEUR D’OPIUM

fluence qu’elles peuvent exercer sur nous, je ne sois pas confondu avec ces rhéteurs irréfléchis et triviaux, les soi-disant poètes de ce siècle, qui rendent à la femme un culte menteur, et pareils aux pirates de Lord Byron, lui offrent un tableau de son prétendu empire fondé uniquement sur des charmes sensuels ou imaginaires. Nous trouvons sans cesse un faux enthousiasme, une ivresse purement dithyrambique, à propos de la femme, chez les modernes versificateurs, ce qui ne se fait qu’aux dépens de l’autre sexe, comme si la femme pouvait être de porcelaine alors que l’homme serait d’argile commune. Même les témoignages de Ledyard et de Park sont, en un certain sens, des hommages trompeurs, quoique aimables, en faveur des qualités féminines ; tout au moins ce n’est qu’un côté de vérité, un aspect relatif à une phase, et vu sous un certain angle. Car, malgré la différence caractéristique des sexes, il est inévitable que l’un jette son reflet sur l’autre. Il est même impossible qu’ils différent beaucoup dans leur développement total. Jusqu’à présent jamais dans une même société, la femme n’a occupé un certain degré d’élévation alors que l’homme en occupait un différent. Ainsi donc, ô fille de Dieu et de l’homme, toute puissante femme, révère ton propre idéal, et dans l’hommage le plus ardent qui t’est offert comme dans les détails les plus réels de ton vaste empire, vois non point un trophée de vain orgueil, mais un avertissement silencieux, qu’il soit volontaire ou non, de la grandeur qui peut être contenue dans ta nature, et qui réalise dans la mesure de tes forces


Et nous montre quelle divine chose
Une femme peut devenir.