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SOUVENIRS AUTOBIOGRAPHIQUES

cause loyaliste qu’il s’était porté garant de sa bonne conduite. Cependant, dans la nuit qui précéda la Pentecôte, le 27 mai, l’étendard de la révolte fut levé par John Murphy, prêtre catholique, bien connu dans le cours ultérieur de l’insurrection sous le nom de père Murphy.

La campagne débuta fâcheusement pour les royalistes. Les rebelles avaient pris position sur deux hauteurs, — Kilthomas, à environ dix milles à l’ouest de Gorey, — et la colline d’Oulart, à mi-chemin, c’est-à-dire à une douzaine de milles entre Gorey et Wexford. Ils furent attaqués sur ces deux points le jour de la Pentecôte. Tout d’abord ils furent aisément repoussés, avec de grandes pertes, mais à Oulart il en fut tout autrement. Là commandait en personne le père Murphy ; s’apercevant que ses hommes reculaient en grand désordre devant un corps d’élite de la milice du nord de Cork, commandé par le lieutenant-colonel Foote, il eut l’art de persuader à ses hommes qu’en fuyant ils tomberaient tout droit sur un corps de cavalerie royale placé de manière à couper la retraite. Cette crainte les arrêta en effet. Grâce à leur inexpérience, les insurgés avaient une peur exagérée de la cavalerie. Ils firent donc de nouveau volte-face pour battre en retraite devant cet ennemi imaginaire, et cela les mit directement en présence de ceux qui les poursuivaient, et que l’ivresse de la victoire avait mis à ce moment dans une débandade complète. Les rebelles les anéantirent jusqu’au dernier, et le père Murphy profitant aussitôt de la consternation universelle, les conduisit à Ferns, et de là à l’attaque d’Enniscorthy. Les insurgés étaient alors au nombre de sept à huit mille.