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SOUVENIRS AUTOBIOGRAPHIQUES

avec ses horreurs et ses calamités. En arrivant à W — house, nous nous trouvions dans une situation et une contrée qui étaient devenues le centre même des dernières opérations militaires, qui avaient eu lieu à la suite de la rébellion proprement dite. Pour le peuple anglais, et plus encore pour les peuples du continent, elles avaient offert un intérêt particulier qui manquait aux mouvements trop naïfs du Père Roche et de Bagenel Harvey. Environ deux mois avant la grande défaite et la dispersion qui en fut la suite dans l’armée rebelle, forte peut-être 25,000 hommes, pourvue d’une artillerie nombreuse quoique de faible calibre, un corps français d’à peu près 900 hommes avait débarqué sur la côte occidentale et rallumé l’insurrection irlandaise. Si cette descente avait eu lieu de manière à pourvoir coopérer avec les insurgés de Wexford, de Kildare et de Wicklow elle aurait donné aux immenses ressources de la rébellion une organisation capable de mettre le gouvernement dam un embarras qui aurait pu aller jusqu’à l’affolement. Il est impossible de douter que considérant la mauvaise tenue de l’armée royale, dans toutes ses parties, à cette époque d’imparfaite discipline, l’Irlande ne fût tombée pour un temps aux mains des Français. Le gouvernement français, étant donné la faiblesse et l’insuffisance du Directoire, aurait-il poussé jusqu’au bout ses avantages, cela est douteux. On peut aussi se demander si sous un gouvernement plus énergique, la vigilance de notre marine n’eût pas dû intercepter ou devancer une expédition, quelle qu’en fût l’importance. Mais il est certain que si une occasion pareille s’était offerte à Napoléon, son énergie n’eût reculé devant aucun