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de son animal qu’elle se courbait le long de l’épine du dos37, et qu’il ne se pouvait servir à troubler l’eau pour empêcher d’être venimeuse, comme disent les auteurs, non pas même à s’en défendre, qui est l’usage des cornes, sinon en se repliant le cou, et amenant la tête entre les jambes de devant, comme font les taureaux dans leurs combats. Elian38 dit qu’elle doit être noire et Ctésias39, médecin du Roi Atarxercès, ne la représente que d’une coudée de haut mais de couleur pourpre à sa pointe et noire en sa partie inférieure ; laquelle variété a fait croire à quelques uns que toutes ces cornes étaient des poissons ou monstres marins, n’y ayant aucun élément susceptible de plus de variétés. A quoi se doit rapporter ce poisson qu’Albert le Grand40 appelle monoceros, pour ce qu’il a une corne sur le front, l’opinion de ceux qui ont cru que la Licorne était le Rhinocéros, étant la moins vraisemblable. Pline assure aussi après Ctésias41 qu’il se trouve des cornes seules en quelques bœufs des Inde, et qu’ils n’ont point l’ongle divisé : ce qu’Elien et Oppien rapportent de quelques taureaux d’Aonie42, et César assure la même chose des bœufs de la Forêt Hercinienne43. Louis Varthema (Lodovico di Barthema)44 a dit avoir vu des vaches en Ethiopie qui n’ont qu’une seule corne. Bref, comme on demeure d’accord qu’il y a des animaux à une corne : ainsi est il impossible de savoir quel est celui à qui l’antiquité a donné ce nom par excellence, qui est la Licorne dont nous parlons : laquelle incertitude les Rois et Républiques qui les ont témoignent bien. Car, s’ils croyaient que ces cornes eussent les propriétés qu’on leur attribue, ils ne les laisseraient pas inutiles en leurs trésors, où elles ne servent que de montre et d’apparat45, non plus que les autres ornements de leurs couronnes, mais ils s’en feraient faire des verres, et à force de s’en servir, ne se trouveraient pas toutes entières comme la plupart, vue qu’Elien, duquel semble avoir été tiré le témoignage de ses grandes vertus, dit que le venin que l’on boirait dans de tels vaisseaux46, ne seraient point nuisible, portant avec foi l’antidote : et que si l’on avait bu du poison auparavant il le ferait vomir47 et toutefois ils ne parlent que par ouï— —dire : et comme les grands menteurs s’ôtent toute croyance, Philostrate48 y ajoute que les Indiens assurent que le jour où on aura bue dans un verre fait de cette corne, non seulement on ne sera point malade tout ce jour là, mais que celui qui sera blessé ne sentira point de douleur, sera non seulement garanti du poison pris par lui, mais pourra passer