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Le Droit est droit : la Loi est incertaine, quelquefois obscure, mystérieuse ; et ce n’est pas petite chose que de savoir montrer qu’elle est juste ou injuste malgré l’apparence. La Jurisprudence n’est autre chose que la philosophie du Droit. On n’est pas jurisconsulte pour avoir acquis l’érudition des textes et l’intelligence de l’argot des écoles ; on ne l’est même pas pour avoir appris les origines et la filiation des usages, coutumes et législations, leurs analogies, leur corrélation, et les textes. On est jurisconsulte quand on sait à fond la raison des lois, leur portée et leur fin ; quand on connaît la pensée supérieure, organique, politique, qui régit tout ; quand on peut démontrer que telle loi est fautive, insuffisante, incomplète. Et pour cela point n’est besoin d’être lauréat de l’Académie.

Tout homme qui raisonne la Loi est jurisconsulte, de même que celui-là est théologien qui raisonne sa foi, est philosophe qui raisonne sur les phénomènes de la nature et de l’esprit. On est, du plus ou moins, philosophe, théologien, jurisconsulte, selon qu’on apporte plus ou moins de persistance, d’étendue et de profondeur dans la recherche des causes, des raisons et des fins. M. Laboulaye a grandement tort de reprocher à MM. Michelet et Guizot de n’être pas jurisconsultes ; il le sont autant et plus que lui.

La propriété, par sa nature psychologique, par la constitution de la Loi, et, j’ajouterai bientôt, par destination sociale, est ABSOLUE : elle ne peut pas ne pas l’être. Or, avant d’entrer dans l’examen de ses motifs, nous