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est trafiquer du genre humain, le refaire esclave.

« La loi française sur les brevets d’invention a déclaré expressément que les principes philosophiques ou scientifiques, c’est-à-dire la connaissance des lois de la nature et de la société, ne sont pas susceptibles d’appropriation. La vente de la vérité, comme celle de la justice, est chose qui répugne, dit le législateur… Le spéculateur inconnu qui inventa les chiffres appelés arabes ; Viète, qui créa l’algèbre ; Descartes, qui appliqua l’algèbre à la géométrie ; Leibnitz, auteur du calcul différentiel ; Neper, qui découvrit les logarithmes ; Papin, qui reconnut la puissance élastique de la vapeur et la possibilité de l’utiliser comme force mécanique ; Volta, qui construisit la fameuse pile ; Arago, qui dans l’électro-magnétisme signala la télégraphie électrique quinze ou vingt ans avant qu’elle existât ; aucun de ces hommes, dont les découvertes dominent la science et l’industrie, n’eût pu être breveté. Pour ces intelligences de premier ordre, le désintéressement le plus absolu est de commande. La loi qui a fait cette étrange répartition entre le savant inventeur du principe, à qui. elle n’accorde rien, et l’industriel, applicateur du principe, qu’elle privilégie, serait-elle injuste, par hasard ? Non, c’est notre conscience qui est faible, c’est notre dialectique qui se fourvoie… La vérité en elle-même n’est pas objet de commerce ; elle ne peut faire la matière d’une appropriation… Conduire la vérité à la foire, c’est immoral, contradictoire. »

Nous ne saurions trop insister sur la différence entre le