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n’étaient pas mûrs pour la liberté et la propriété ? Ainsi la société serait soumise à une sorte de flux et de reflux : elle s’élève avec l’alleu, elle redescend avec le fief ; rien ne subsiste, tout oscille ; et si nous savons à présent à quoi nous en tenir sur les fins de la propriété, et conséquemment sur les causes de son progrès, nous savons également à quoi attribuer sa rétrogradation. Le même absolutisme produit tour à tour ascension et l’affaissement. Le propriétaire combat d’abord pour sa dignité d’homme et de citoyen, pour l’indépendance de son travail et la liberté de ses entreprises. Il s’affirme comme justicier et souverain, possédant en vertu de son humanité et sans relever de personne, et il décline toute suzeraineté politique ou religieuse. Puis, fatigué de l’effort, sentant que la propriété est plus difficile à soutenir qu’à conquérir, trouvant la jouissance meilleure que la gloire et sa propre estime, il transige avec le pouvoir, abandonne son initiative politique, en échange d’une garantie de privilège, vend son droit d’aînesse pour un plat de lentilles, mangeant son honneur avec son revenu, et provoquant par son parasitisme l’insurrection du prolétariat et la négation de la propriété. Pouvons nous enfin rompre ce cercle ? pouvons-nous, en autres termes, purger l’abus propriétaire et rendre l’institution sans reproche ? Ou faut-il que nous nous laissions emporter au courant des révolutions, aujourd’hui avec la propriété contre la tyrannie féodale, demain avec la démocratie absolutiste et l’agiotage contre le bourgeois et son droit quiritaire ? Là est