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féodaux : mais qu’est-ce donc, je vous prie, que le fermage ?…

Voici ce que j’écrivais à ce propos, en 1858, dans mon ouvrage de la Justice dans la Révolution et dans l’Église, 5e étude :

« La métaphysique de la propriété a dévasté le sol français (par l’arbitraire des exploitations), découronné les montagnes, tari les sources, changé les rivière, en torrents, empierré les vallées : le tout avec autorisation du gouvernement. Elle a rendu l’agriculture odieuse au paysan (fermier) ; plus odieuse encore la patrie ; elle pousse à la dépopulation… On ne tient plus au soi, comme autrefois, parce qu’on l’habite, parce qu’on le cultive, qu’on en respire les émanations, qu’on vit de sa substance, qu’on l’a reçu de ses pères avec le sang, et qu’on le transmettra de génération en génération dans sa race, parce qu’on y a pris son corps, son tempérament, ses instincts, ses idées, son caractère, et qu’on ne pourrait s’en séparer sans mourir. On tient au sol comme à un outil, moins que cela, à une inscription de rentes au moyen de laquelle on perçoit chaque année, sur la masse commune, un certain revenu. Quant à ce sentiment profond de la nature, à cet amour du sol que donne seule la vie rustique, il s’est éteint, Une sensibilité de convention, particulière aux sociétés blasées à qui la nature ne se révèle plus que dans le roman, le salon, le théâtre, a, pris sa place.

« … L’homme n’aime plus la terre : propriétaire, il la vend, il la loue, il la divise par actions, il la prostitue,