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pouvoir faire passer la terre quiritaire en des mains plébéiennes.

3. Ce fut le roi Servius qui le premier concéda quelques terres aux gens du peuple. Plus tard, après la chute des Tarquins, l’aristocratie intéressa le peuple à la révolution en distribuant à chaque citoyen sept jugera, pris sur les biens de l’ex-roi. En 454 avant J.-C., le mont Aventin, pâturage communal, est aussi partagé à la plèbe. Mais toutes ces allocations sont faites à titre de possession, c’est-à-dire que l’homme du peuple ne possède qu’à titre d’usufruit ; il ne peut ni engager ni vendre, l’État, conservant le domaine et la nue propriété. Enfin, en 376, par la loi des tribuns Licinius Stolon et L. Sextius, les plébéiens sont admis, comme les patriciens, au partage des terres conquises, ou de l’ager publicus ; une classe moyenne nombreuse se forme à l’aide de ces possessions, que convoitent ardemment les nobles. Mais, chose remarquable, toutes ces terres enlevées à l’ager pub1icus, en quelques mains qu’elles passent, patriciennes ou plébéiennes, conservent leur attache à l’État ; il n’y a que celles du partage primitif qui soient à titre quiritaire. En sorte qu’on peut dire que la possession est la règle, la propriété l’exception. Au fond, toute la différence entre la possession et la propriété, à cette époque, est dans la potentialité du droit quiritaire plutôt que dans l’exercice ; car si le noble pouvait aliéner son bien, en fait, cela n’arrivait pas : la propriété restait immuable. Bien loin que le quirite songeât à se dessaisir, son ambition était de s’agrandir,