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Devant cette analyse, toutes les apologies de la propriété qu’on a produites dans ces dernières années, toutes les explications qu’on a données de son origine, tombent ; ce sont des bucoliques ridicules. Car enfin, dirai-je à ces apologistes maladroits, j’accorde la bonne foi, je reconnais l’hérédité, la possession, la prescription, le droit sacré du travail, l’intérêt même de l’État : mais, enfin, pourquoi cet abus ? Pourquoi -cette faculté de disposer absolument ? A-t-on jamais entendu parler d’une Loi, d’une Morale, qui autorise le vice, la débauche, l’arbitraire, l’impiété, le meurtre, le vol, le rapt, sous réserve de punir les délinquants qui auront dépassé une certaine limite, que ne définit pas même la Loi ?

Prenons la propriété la plus respectée de toutes, celle qui est acquise par le travail. Pourquoi, demandai-je, en sus du prix légitimement dû au producteur, de l’indemnité de ses travaux et de ses soins, pourquoi concéder ce droit d’abuser, de disposer absolument : ce que ne ferait pas un bon père de famille vis-à-vis du plus cher de ses enfants ?…

Remarquez que cette définition du Législateur gallo-romain est d’autant plus étonnante, je dirai presque scandaleuse, qu’il a parfaitement distingué la PROPRIÉTÉ, sciemment par lui déclarée abusive, de la possession, qui ne l’est pas. Cette distinction a été si bien faite qu’elle a produit deux points de vue différents sur lesquels roule tout le droit civil, et qu’on appelle en termes d’école possessoire et pétitoire. Le possessoire est tout ce qui est relatif à la possession non abusive ; le pétitoire,