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ne pourrait revenir à l’unité qu’au moyen de la monnaie, signe représentatif des valeurs, et d’une généralisation, c’est-à-dire d’une fiction fiscale, qui consisterait à comprendre toutes les valeurs sous une désignation commune, capital, travail ou revenu.

Observation. — Je reviendrai plus tard sur la théorie de l’impôt unique. Ce que je veux faire remarquer ici, c’est que par les mots capital, travail, rente ou revenu, on n’entend pas des choses positives, réelles, des choses qui existent, se laissent voir et palper ; ce sont termes généraux, inventés pour désigner certains rapports et certaines opérations, ce sont en un mot des abstractions. Or l’État, pas plus que le citoyen, ne vit d’abstractions ; il vit de réalités. Ses consommations consistent en blé, viande, fourrage, vin, huile, houille, linge et chaussure, fer et bronze, etc. D’où il résulte que, malgré la généralité de l’expression par laquelle on désignerait l’impôt : impôt sur le capital, impôt sur le revenu, etc., et nonobstant l’usage du numéraire sous l’espèce duquel l’impôt est payé d’abord à l’État pour servir ensuite à acheter à l’État les divers objets de sa consommation, l’impôt se perçoit finalement aujourd’hui, comme au temps de Moïse, sur les fruits de la terre, le croît des animaux, les produits du travail, etc. L’impôt est donc, quoi qu’on fasse, multiple dans sa matérialité ; c’est par une fiction de la langue et par un artifice d’échange qu’il peut reprendre une apparence unitaire, comme dans le cas où, par exemple, on le ferait consister en un prélèvement de tant p. % sur le capital