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du moins. Mais il aimait le peuple, il tenait surtout à en être aimé. Il rétablit donc l’impôt du sel à la suite de celui des boissons, et les finances se trouvèrent en équilibre. »

Il est de ces choses qu’il faut lire de ses yeux et entendre de ses oreilles, pour y croire. Tout le monde s’était imaginé, en vertu même de la loi de répercussion ou diffusion de l’impôt, que c’était sur les masses travailleuses, pauvres, consommant peu, que pesait l’impôt ; que c’était parce qu’elles donnaient tout à l’impôt qu’il ne leur restait rien pour elles-mêmes ; qu’au rebours c’était parce que le riche produisait peu et ne payait rien qu’il pouvait consommer beaucoup. M. Thiers vient de nous prouver le contraire. C’est en 1848, alors que l’utopie débordant de toutes parts menaçait la propriété, que M. Thiers a jeté dans le monde cette idée à lui, en ayant soin de l’entourer de toutes les précautions oratoires. « Je n’ai aucun penchant, dit-il, pour les opinions singulières. Je n’aime que les opinions communes, tout comme en fait d’esprit je n’aime que le sens commun. Si celle-ci n’était que singulière, elle ne serait pas de mon goût, mais elle est rigoureusement vraie, et je vais l’exposer pour tâcher de faire cesser beaucoup d’erreurs, fort nuisibles aux classes pauvres qu’on a tant à cœur de servir. » (De la Propriété.) Et là-dessus M. Thiers se met à exposer compendieusement le phénomène de la diffusion de l’impôt.

Un homme de l’importance de M. Thiers mérite toujours qu’on le réfute : la certitude de la théorie de l’impôt et la correction du langage économique l’exigent. Il n’y a pas un ouvrier qui ne sente le faux de ce singulier raisonnement : Le riche paye le plus d’impôt, parce qu’il consomme le plus. Mais tous ne sont pas capables d’en démontrer le sophisme.

En ce qui concerne l’impôt de consommation, par exemple, c’est le vendeur, fabricant, commerçant ou propriétaire, qui