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économistes, les vénérables physiocrates, songeaient à établir la totalité de l’impôt. La rente foncière eut l’honneur de la première utopie qui ait été proposée depuis un siècle, sous l’influence de l’idée moderne.

L’impôt sur la rente foncière, nous l’avons vu, offre d’incontestables avantages. Il est sujet à moins d’erreurs, par conséquent plus égal. Au lieu des évaluations toujours fautives d’un cadastre, il suffit de consulter les baux et titres de vente. Il n’atteint pas le travail : la totalité de la rente foncière pourrait être prise par l’État, sans que ni le cultivateur, ni l’agriculture, ni l’industrie, ni le commerce, ni le prix des subsistances en souffrissent. Qu’importe du reste que, dans les transactions qui auront pour objet la propriété, la part de l’État soit déduite de manière que l’acquéreur puisse se considérer toujours comme exempt d’impôt, si, en fait, par l’ensemble du système, tous les contribuables jouissent d’avantages équivalents ?

La part naturelle de l’État dans la rente, selon une critique judicieuse, est en moyenne du tiers. Portons-la seulement au sixième, afin d’éviter tout reproche de tendre à l’expropriation. En France, où la rente foncière est évaluée en totalité à 1,800 millions, quelques-uns disent deux milliards, ce serait une recette, facile à opérer, de 300 à 350 millions. C’est plus sans doute que ne demande actuellement l’impôt foncier. Mais il faut observer que l’impôt sur la rente est le seul qui s’adresse à une valeur donnée, pour ainsi dire, gratuitement ; tous les autres tombent sur le