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complète de toute espèce de succession, directe et collatérale. C’est là une attaque formelle à la famille, à l’organisation intime de la société. Presque partout le fisc, toujours avide, s’est rendu complice de cette tendance mauvaise en frappant au passage les transmissions de propriété ; il a fait ici comme pour l’impôt somptuaire, donnant, au profit de sa caisse, une chimère de consolation aux déshérités, et reprenant aux héritiers une part des biens qui leur sont dévolus par la loi, et dont la mission de l’État est de leur assurer la possession.

Les impôts que nous venons de passer en revue, personnel, mobilier, foncier, des portes et fenêtres, des patentes, l’impôt sur les articles de luxe, les prestations en nature, tout cela, malgré les énormes écarts qu’il est facile d’y relever, pouvait être considéré comme une hypothèse de solution plus ou moins rationnelle, et, dans tous les cas, inoffensive au point de vue social. Que l’État se montrât plus ou moins judicieux dans la répartition, les inégalités de l’impôt ne faisaient de mal qu’à la bourse des particuliers. En multipliant l’erreur par la variété des contributions on pouvait même espérer que les inégalités se compenseraient.

Avec l’impôt sur les successions l’État sort de ses attributions fiscales ; il se fait réformateur des mœurs, ce qui est bien autrement grave que de s’immiscer dans l’industrie ; il s’introduit dans la famille ; dans une certaine mesure il la nie. Il défait ce qui est au-dessus de lui, antérieur à lui, ce sans quoi il n’existe-