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M. Passy, grand partisan d’ailleurs de cette nature de taxes, y signale d’autres inconvénients.

« Une remarque essentielle, en ce qui concerne l’impôt territorial, dit-il, c’est qu’il finit par ne plus être constitué à titre onéreux pour ceux qui l’acquittent. Cet effet résulte des transmissions dont la terre est l’objet. Sur chaque fraction du sol pèse, par l’effet de l’impôt, une rente réservée à l’État. Acheteurs et vendeurs le savent : ils tiennent compte du fait dans leurs transactions, et les prix auxquels ils traitent entre eux se règlent uniquement en vue de la portion de revenu qui, l’impôt payé, demeure nette, c’est-à-dire affranchie de toute charge. Aussi le temps arrive-t-il où nul n’a plus le droit de se plaindre d’une redevance antérieure à son entrée en possession, et dont l’existence, connue de lui, a atténué proportionnellement le montant des sacrifices qu’il a eu à faire pour acquérir. »

L’auteur conclut à la nécessité de ne pas toucher aux taxes : les aggraver, ce serait entamer le revenu du propriétaire, ou, pour mieux dire, substituer le domaine de l’État à la propriété, ce qui nous ramène au droit féodal ; les diminuer, ce serait leur faire cadeau d’une rente. Ces considérations nous paraissent on ne peut plus justes ; mais il n’en est pas moins vrai de dire que cette immunité du propriétaire, cette franchise fiscale, constatée par M. Passy, est encore plus grave devant la justice que l’inégalité de répartition signalée par MM. Lemire et Poussielgue. En effet, toute propriété, quel qu’en soit l’impôt, étant, comme