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primée, la plupart des phénomènes économiques deviennent inintelligibles ; et je ferai voir en son lieu comment, par suite de cette grave omission, la plupart des économistes faisant des livres ont déraisonné sur la balance du commerce.

J’ai dit tout à l’heure que la société produit d’abord les choses les moins coûteuses, et par conséquent les plus nécessaires… Or, est-il vrai que dans le produit, la nécessité ait pour corrélatif le bon marché, et vice versâ ; en sorte que ces deux mots, nécessité et bon marché, de même que les suivants, cherté et superflu, soient synonymes ?

Si chaque produit du travail, pris isolément, pouvait suffire à l’existence de l’homme, la synonymie en question ne serait pas douteuse ; tous les produits ayant les même propriétés, ceux-là nous seraient les plus avantageux à produire, par conséquent les plus nécessaires, qui coûteraient le moins. Mais ce n’est point avec cette précision théorique que se formule le parallélisme entre l’utilité et le prix des produits : soit prévoyance de la nature, soit par toute autre cause, l’équilibre entre le besoin et la faculté productrice est plus qu’une théorie, c’est un fait, dont la pratique de tous les jours, aussi bien que le progrès de la société, dépose.

Transportons-nous au lendemain de la naissance de l’homme, au jour de départ de la civilisation : n’est-il pas vrai que les industries à l’origine les plus simples, celles qui exigèrent le moins de préparations et de frais, furent les suivantes : cueillette, pâture, chasse et pêche, à la suite desquelles et longtemps après l’agriculture est venue ? Depuis lors, ces quatre industries primordiales ont été perfectionnées et de plus appropriées : double circonstance qui n’altère pas l’essence des faits, mais qui lui donne au contraire plus de relief. En effet, la propriété s’est toujours attachée de préférence aux objets de l’utilité la plus immédiate, aux valeurs faites, si j’ose ainsi dire ; en sorte que l’on pourrait marquer l’échelle des valeurs par le progrès de l’appropriation.

Dans son ouvrage sur la Liberté du travail, M. Dunoyer s’est positivement rattaché à ce principe, en distinguant quatre grandes catégories industrielles, qu’il range selon