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« Le gouvernement, selon M. Blanc, choisirait des ouvriers moraux, et leur donnerait de bons salaires. » — Ainsi il faut à M. Blanc des hommes faits exprès : il ne se flatte pas d’agir sur toute espèce de tempéraments. Quant aux salaires, M. Blanc les promet bons ; c’est plus aisé que d’en définir la mesure.

« M. Blanc admet par hypothèse que ces ateliers donneraient un produit net, et feraient en outre une si bonne concurrence à l’industrie privée que celle-ci se transformerait en ateliers nationaux. »

Comment cela se pourrait-il, si les prix de revient des ateliers nationaux sont plus élevés que ceux des ateliers libres ? J’ai fait voir au chapitre Ier que les 300 ouvriers d’une filature ne produisent pas à l’exploitant, entre eux tous, un revenu net et régulier de 20,000 fr ; et que ces 20,000 fr. répartis entre les 300 travailleurs n’augmenteraient leur revenu que de 18 centimes par jour. Or, ceci est vrai de toutes les industries. Comment l’atelier national, qui doit à ses ouvriers de bons salaires, comblera-t-il ce déficit ? — Par l’émulation, dit M. Blanc.

M. Blanc cite avec une extrême complaisance la maison Leclaire, société d’ouvriers peintres en bâtiments faisant très-bien leurs affaires, et qu’il regarde comme une démonstration vivante de son système. M. Blanc aurait pu ajouter à cet exemple une multitude de sociétés semblables, qui prouveraient tout autant que la maison Leclaire, c’est-à-dire pas plus. La maison Leclaire est un monopole collectif, entretenu par la grande société qui l’enveloppe. Or, il s’agit de savoir si la société tout entière peut devenir un monopole, au sens de M. Blanc et sur le patron de la maison Leclaire : ce que je nie positivement. Mais ce qui touche de plus près à la question qui nous occupe, et à quoi M. Blanc n’a pas pris garde, c’est qu’il résulte des comptes de répartition que la maison Leclaire lui a fournis, que, les salaires de cette maison étant de beaucoup supérieurs à la moyenne générale, la première chose à faire dans une organisation de la société serait de susciter à la maison Leclaire, soit parmi ses ouvriers, soit au dehors, une concurrence.

« Les salaires seraient réglés par le gouvernement. Les