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CHAPITRE IV.


DEUXIÈME ÉPOQUE. — LES MACHINES.


« J’ai vu avec un profond regret la continuation de la détresse dans les districts manufacturiers du pays. »

Paroles de la reine Victoria à la rentrée du parlement.

Si quelque chose est propre à faire réfléchir les souverains, c’est que, spectateurs plus ou moins impassibles des calamités humaines, ils sont, par la constitution même de la société et la nature de leur pouvoir, dans l’impossibilité absolue de guérir les souffrances des peuples : il leur est même interdit de s’en occuper. Toute question de travail et de salaire, disent d’un commun accord les théoriciens économistes et représentatifs, doit demeurer hors des attributions du pouvoir. Du haut de la sphère glorieuse où les a placés la religion, les trônes, les dominations, les principautés, les puissances et toute la céleste milice regardent, inaccessibles aux orages, la tourmente des sociétés ; mais leur pouvoir ne s’étend pas sur les vents et sur les flots. Les rois ne peuvent rien pour le salut des mortels. Et, en vérité, ces théoriciens ont raison : le prince est établi pour maintenir, non pour révolutionner ; pour protéger la réalité, non pour procurer l’utopie. Il représente l’un des principes antagonistes : or, en créant l’harmonie il s’éliminerait lui-même, ce qui de sa part serait souverainement inconstitutionnel et absurde.

Mais, comme en dépit des théories le progrès des idées change sans cesse la forme extérieure des institutions, de manière à rendre continuellement nécessaire cela même que le législateur n’a ni voulu ni prévu ; qu’ainsi, par exemple,