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a si bien nommé exploitation de l’homme par l’homme.

De trois choses l’une, ou le travailleur aura part à la chose qu’il produit avec un chef, déduction faite de tous les salaires, ou le chef rendra au travailleur un équivalent de services productifs, ou bien il s’obligera à le faire travailler toujours. Partage du produit, réciprocité de services, ou garantie d’un travail perpétuel, le capitaliste ne saurait échapper à cette alternative. Mais il est évident qu’il ne peut satisfaire à la seconde et à la troisième de ces conditions : il ne peut ni se mettre au service de ces milliers d’ouvriers, qui, directement ou indirectement, ont procuré son établissement ; ni les occuper tous et toujours. Reste donc le partage de la propriété. Mais si la propriété est partagée, toutes les conditions seront égales ; il n’y aura plus ni grands capitalistes ni grands propriétaires.

Lors donc que M. Ch. Comte, poursuivant son hypothèse, nous montre son capitaliste acquérant successivement la propriété de toutes les choses qu’il paye, il s’enfonce de plus en plus dans son déplorable paralogisme ; et comme son argumentation ne change pas, notre réponse revient toujours.

« D’autres ouvriers sont employés à construire des bâtiments ; les uns tirent la pierre de la carrière, les autres la transportent, d’autres la taillent, d’autres la mettent en place. Chacun d’eux ajoute à la matière qui lui passe entre les mains une certaine valeur, et cette valeur, produit de son travail, est sa propriété. Il la vend, à mesure qu’il la forme, au propriétaire du fonds, qui lui en paye le prix en aliments et en salaires. »

Divide et impera : divise, et tu régneras ; divise, et tu deviendras riche ; divise, et tu tromperas les hommes, et tu éblouiras leur raison, et tu te moqueras de la justice. Séparez les travailleurs l’un de l’autre, il se peut que la journée payée à chacun surpasse la valeur de chaque produit individuel : mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit. Une force de mille hommes agissant pendant vingt jours a été payée comme la force d’un seul le serait pour cinquante-cinq années ; mais cette force de mille a fait en vingt jours