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sauvages ; elle proscrit ces formes exagérées du respect humain. Et pourtant elle n’entend point, avec les jacobins et les doctrinaires, qu’on puisse procéder à cette réforme par autorité législative ; elle n’admet pas que personne ait le droit de procurer le bien du peuple malgré le peuple, qu’il soit licite de rendre libre une nation qui veut être gouvernée. La philosophie ne donne sa confiance qu’aux réformes sorties de la libre volonté des sociétés : les seules révolutions qu’elle avoue sont celles qui procèdent de l’initiative des masses : elle nie, de la manière la plus absolue, la compétence révolutionnaire des gouvernements.

En résumé :

Si l’on n’interroge que la foi, la scission de la société apparaît comme l’effet terrible de la déchéance originelle de l’homme. C’est ce que la mythologie grecque a exprimé par la fable des guerriers nés des dents du serpent, et qui s’entre-tuèrent tous après leur naissance. Dieu, d’après ce mythe, a laissé aux mains de partis antagonistes le gouvernement de l’humanité, afin que la discorde établisse son règne sur la terre, et que l’homme apprenne, sous une perpétuelle tyrannie, à reporter sa pensée vers un autre séjour.

Devant la raison, les gouvernements et les partis ne sont que la mise en scène des concepts fondamentaux de la société, une réalisation d’abstractions, une pantomime métaphysique, dont le sens est Liberté.

Cette double définition du gouvernement et des partis, constitue notre profession de foi politique. Vous connaissez, lecteur, les personnages allégoriques qui, dans ce compte-rendu, vont remplir les premiers rôles ; vous savez quel est le sujet de la représentation : soyez maintenant attentifs à ce que je vais vous raconter.