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leur dernière heure ; ces tremblements parmi les peuples, ces grandes désolations de l’histoire ? Écoutez Bossuet, écoutez tous ceux que la foi courbe sous son joug salutaire ; ils vous répondront que les vues de la Providence sont inaccessibles à la prudence de l’homme, et que tout arrive pour la plus grande gloire de Dieu, ad majorem Dei gloriam !

Moins modeste que la foi, la philosophie essaye de donner un peu de sens aux choses de ce monde ; elle leur assigne des motifs et des causes ; et quand la théologie, sa souveraine, se tait, l’audacieuse suivante prend la parole. Où la révélation surnaturelle finit, la révélation rationnelle commence.

Qu’est-ce d’abord que la religion ? La religion est l’éternel amour qui ravit les âmes au-delà du sensible, et qui entretient dans les sociétés une inaltérable jeunesse. Ce n’est point à elle de nous donner la science : le dogme dans la religion ne sert qu’à éteindre la charité. Pourquoi de soi-disant théologiens voudraient-ils faire du plus pur de notre conscience une phantasmasie de mystères ?…

Dieu est la force universelle, pénétrée d’intelligence, qui produit, par une information sans fin d’elle-même, les êtres de tous les règnes, depuis le fluide impondérable jusqu’à l’homme, et qui, dans l’homme seul, parvient à se connaître et à dire Moi ! Loin d’être notre maître, Dieu est l’objet de notre étude : plus nous l’approfondissons, plus, selon le côté par lequel nous l’envisageons, la nature des attributs que nous lui prêtons, il semble s’approcher ou s’éloigner de nous, à tel point que l’essence de Dieu peut être considérée indifféremment comme l’essence de l’homme ou comme son antagoniste.

Comment les thaumaturges en ont-ils fait un être fixe et personnel, tantôt roi absolu, comme le dieu des Juifs et des chrétiens, tantôt souverain constitutionnel comme celui des déistes, et dont la Providence incompréhensible n’est oc-