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sort de la démocratie européenne est tombé de nos mains civiques à celles des prétoriens.

Mais la guerre de Rome en est-elle plus juste et plus constitutionnelle ?

Mais l’Italie, la Hongrie, la Pologne, parce qu’elles protestent dans le silence, sont-elles rayées du catalogue des nations ?

Mais, démocrates-socialistes, avons-nous cessé d’être le parti de l’avenir, parti qui compte aujourd’hui la moitié de la France ?

Mais vous, bourgeois désolés, que l’on ne cesse d’irriter contre nous, et dont notre désastre consomme la ruine, en êtes-vous plus dynastiques, plus jésuites, plus cosaques ?…

Depuis quatre mois, je les regarde dans leur triomphe, ces charlatans de la famille et de la propriété ; je les suis de l’œil dans les titubations de leur ivresse ; et, à chaque geste, à chaque mot qui leur échappe, je me dis : Ils sont perdus !

N’en doutez pas, amis : si la Révolution a été depuis février sans cesse ajournée, c’est que l’éducation de notre jeune démocratie l’exigeait. Nous n’étions pas mûrs pour la liberté ; nous la cherchions là où elle n’est pas, où elle ne peut jamais se trouver. Sachons la comprendre maintenant, et, par le fait de notre intellection, elle existera.

Républicains, voulez-vous abréger votre épreuve, ressaisir le gouvernail, redevenir bientôt les arbitres du monde ? Je vous demande pour tout effort de ne plus toucher, jusqu’à nouvel ordre, à la Révolution. Vous ne la connaissez point : étudiez-la. Laissez faire seule la Providence : jamais, par le conseil des mortels, elle ne fut en meilleure voie. Restez immobiles, quoi qu’il advienne ; recueillez-vous dans votre foi, et regardez, avec le sourire du soldat assuré de la victoire, vos superbes triomphateurs.

Les insensés ! ils pleurent ce qu’ils ont fait depuis trente