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ment comme des personnages sacrés. Je n’ai pas été plus qu’un autre exempt de passion et de violence ; surpris à l’improviste, j’ai payé largement le tribut à l’humaine faiblesse. J’ai cru même remarquer alors, la philosophie me le pardonne ! que plus la réflexion acquiert en nous de développement, plus la passion, quand elle se déchaîne, gagne en brutalité. Il semble alors que l’ange et le bipède, dont l’union intime constitue notre humanité, au lieu de confondre leurs attributs, vivent seulement de compagnie. Si c’est là que nous mène le progrès, à quoi sert-il ?...

Dévoré d’inquiétudes, j’attendais avec impatience le résultat de l’élection de décembre qui devait faire cesser toutes les dissidences. Dans l’intervalle la Constitution fut votée : je dois dire la part que j’y ai prise, et justifier mon opinion.


XIV.


4 NOVEMBRE :


LA CONSTITUTION.


Le 4 novembre 1848 fut votée dans son ensemble la Constitution. 769 représentants assistaient à la séance : 739 votèrent pour, 30 contre. Sur ces 30 voix protestantes, il y en avait 16 de démocrates-socialistes, 14 de légitimistes. M. Odilon Barrot, qui le premier devait appliquer la Constitution, s’était abstenu.

Le jour même du vote, je crus devoir expliquer, dans une lettre insérée au Moniteur, les motifs qui m’avaient déterminé. Voici cette lettre :


« Monsieur le rédacteur.

« L’Assemblée nationale vient de proclamer la Constitution aux cris prolongés de : Vive la République !