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sont la représentation des opérations, l’observatoire d’où le gérant dirige toute la marche des affaires : pareillement, dans la société, la théorie des antinomies est à la fois la représentation et la base de tout mouvement. Les mœurs et les institutions peuvent varier de peuple à peuple, comme le métier et les mécaniques varient de siècle à siècle, de ville à ville : les lois qui régissent leurs évolutions sont inflexibles comme l’algèbre. Partout où il existe des hommes groupés par le travail ; partout où l’idée de valeur marchande a pris racine, où par la séparation des industries, il se fait une circulation de valeurs et de produits : là, à peine de perturbation, de déficit, de banqueroute de la société envers elle-même, à peine de misère et de prolétariat, les forces antinomiques de la société, inhérentes à tout déploiement de l’activité collective, comme à toute raison individuelle, doivent être tenues dans un constant équilibre ; et l’antagonisme, perpétuellement reproduit par l’opposition fondamentale de la société et de l’individualité, être perpétuellement ramené à la synthèse.

On s’est scandalisé de voir figurer dans ce système, en opposition l’un à l’autre, Dieu et l’homme ; on a trouvé étrange que je voulusse établir, comme je l’avais fait pour la propriété et la communauté, les comptes de la Liberté humaine et d’une hypothétique Providence ; les tartufes ont crié à l’athéisme et au sacrilége. Et pourtant cette partie des Contradictions n’est pas autre chose que le catholicisme expliqué par la philosophie, la réalité substituée au symbole.

Qu’est-ce que le catholicisme ? le système mystique des rapports entre Dieu et l’Humanité. La théorie des contradictions abolit ce mysticisme : elle fait de la théologie la science positive des rapports entre le Créateur, ou la nature, mère de tous les êtres, alma parens rerum natura, et l’homme, son expression la plus élevée, par conséquent son antithèse.