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manité, d’autres n’y découvrent que sa faiblesse. Quoi qu’il en soit du mérite ou du démérite de la croyance à l’idée de Dieu, il est certain que le début de toute spéculation métaphysique est un acte d’adoration du Créateur : c’est ce que l’histoire de l’esprit humain, chez tous les Peuples, constate d’une manière invariable.

Mais qu’est-ce que Dieu ? Voilà ce que demandent aussitôt, et d’un mouvement irrésistible, le croyant et le philosophe. Et, comme corollaire de cette première interrogation, ils se posent immédiatement celle-ci : Quelle est, de toutes les religions, la meilleure ? En effet, s’il existe un Être supérieur à l’Humanité, il doit exister aussi un système de rapports entre cet Être et l’Humanité : quel est donc ce système ? La recherche de la meilleure religion est le second pas que fait l’esprit humain dans la Raison et dans la Foi.

À cette double question, pas de réponse possible. La définition de la Divinité échappe à l’intelligence. L’Humanité a été tour à tour fétichiste, idolâtre, chrétienne et bouddhiste, juive et mahométane, déiste et panthéiste : elle a adoré tour à tour les plantes, les animaux, les astres, le ciel, l’âme du monde, et, finalement, elle-même : elle a erré de superstition en superstition, sans pouvoir saisir l’objet de sa croyance, sans parvenir à déterminer son Dieu. Le problème de l’essence et des attributs de Dieu et du culte qui lui convient, comme un piège tendu à son ignorance, tourmente l’Humanité dès son origine. Les Peuples se sont égorgés pour leurs idoles, la société s’est épuisée à l’élaboration de ses croyances, sans que la solution ait avancé d’un pas.

Le déiste, le panthéiste, comme le chrétien et l’idolâtre, est réduit à la foi pure. On dirait même, et c’est le seul progrès que nous ayons fait dans cette étude, qu’il répugne à la raison de connaître et de savoir Dieu : il ne nous est