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fices faits au travail profitent moins encore à l’ouvrier qu’au patron, et qu’après tout la bourgeoisie est encore la partie la plus intéressée à cette reprise tutélaire du travail. — « 200 millions pour licencier une armée de 100,000 hommes, s’écriait M. le baron calculateur Charles Dupin ! » Comme si les 100,000 hommes des ateliers nationaux n’avaient pas été une minime fraction de la classe travailleuse alors sans ouvrage ! Ah ! si au lieu des travailleurs, il avait été question d’une compagnie de chemin de fer !... — « 200 millions ! c’est bien cher ? Ce serait une honte d’admettre que, pour conserver la paix publique, il fallût payer à chacun de vos 100,000 ouvriers une prime de 2,000 fr. Nous n’y consentirons jamais. Tout au plus pourrait-on, en prononçant la dissolution immédiate, donner à chaque homme le salaire de trois mois, soit 100 fr., en tout 10 millions, ce qui est loin de 200. Avec cette avance, les ouvriers se retireraient sans doute satisfaits. »

Et dans trois mois ?... demandait le directeur Lalanne.

Mais il s’agissait bien de raisonner, vraiment ! Des clameurs s’élèvent contre tout projet de nature à ménager les transitions ; on veut en finir. On le dit tout bas d’abord, et l’on se contente prudemment de faire aux actes du gouvernement une sourde opposition. Mais bientôt on s’enhardit, on se décide à courir les chances d’une lutte terrible. Cette voix qui répète incessamment qu’il faut en finir, et qui s’échappe à travers les portes des bureaux de l’Assemblée, porte dans les masses le trouble et l’exaspération. Et cependant les ouvriers, bien éloignés déjà de cette époque où ils assignaient un terme de trois mois à l’organisation agricole-industrielle, consentaient tous à rentrer chez leurs patrons, avec la seule garantie que leur donnait la nouvelle loi sur les prud’hommes, votée sous l’initiative de Flocon, alors ministre du commerce. — Du travail ! un travail utile ! tel était le cri que d’une voix unanime poussèrent