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de la tribune : C’est dans votre intérêt à tous, crie-t-il à ceux qui protestent contre sa véhémence. Je demande qu’on accorde la parole aux délégués des clubs pour lire leur pétition. La pétition est lue. Blanqui, porté à la tribune, prend la parole. Il réclame le châtiment de la garde bourgeoise de Rouen, parle du travail et d’une foule de choses étrangères à la Pologne. C’était la conclusion du discours de Wolowski. Barbès enchérit sur Blanqui, et propose un milliard d’impôt sur les riches. Enfin Huber, par une inspiration soudaine, et dont il a revendiqué pour lui seul toute la responsabilité, prononce la dissolution de l’Assemblée, et décide la partie en faveur de Barbès. Les représentants se retirent : Barbès et ses amis se rendent à l’Hôtel-de-Ville ; Blanqui et les siens n’y parurent pas. Ce qui suivit ne fut qu’une débandade : les gardes nationaux, à grand’peine rappelés, ne rencontrèrent aucune résistance. Le peuple avait passé comme une pluie d’orage. Trouvant apparemment que ceux qui parlaient tant d’agir n’étaient que des discoureurs comme les autres, et n’espérant rien de tous ces gouvernements qu’on lui faisait remuer comme des pavés, il était allé, l’Assemblée dissoute et la séance levée, se reposer des émotions de la journée.

La manifestation du 15 mai, toute parlementaire au commencement, soulevait, en dehors de la question du travail, qui dominait tout, deux autres questions fort graves : une question constitutionnelle, savoir, si, dans une République, le droit de faire la paix et de déclarer la guerre appartient au gouvernement ; une question politique, si, dans les circonstances particulières où se trouvait la République française, trois mois après la révolution de février, il était utile ou non pour le pays de faire la guerre ?

La manifestation du 15 mai, par une double erreur, résolvait ces deux questions affirmativement. En poussant le Gouvernement à la guerre, afin de servir les vœux de la