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dont un quart sert à payer les frais d’état, église et autres fonctions appelées improductives ou parasites ; un autre quart appartient à titre d’intérêt, rente, loyer, dividende, agio, commission, bénéfice, etc., aux propriétaires, capitalistes et entrepreneurs ; ce qui laisse pour la classe travailleuse, en y comprenant ceux de la classe moyenne qui ne réalisent pas de bénéfice, et c’est le grand nombre, un revenu ou salaire qu’on peut évaluer à 41 centimes par tête et par jour, et qui dans les cas extrêmes est au-dessous de 15.

Tel était, en raccourci, au 24 février, le bilan de la nation française.

Il en résulte que la force de cette nation, abstraction faite du territoire et du nombre des habitants, ce qui constitue son importance comme organe et fonction dans l’humanité, lui vient uniquement de sa féodalité gouvernementale et bourgeoise. Le peuple, la masse servile, exploitée mais non organisée, est sans valeur politique. Son rôle est, à peu de chose près, celui de l’esclavage chez les anciens. Supposez pour un instant la hiérarchie qui le contient et le met en œuvre, détruite ; le pouvoir anéanti, dans son personnel et ses emplois ; la bourgeoisie exterminée, ses richesses partagées ; supposez cette multitude, indigente et illettrée, barbare si l’on veut mais non pas vile, devenue maîtresse par un coup de baguette révolutionnaire, passant le niveau sur l’Église et sur l’état, et réalisant à sa manière la parabole de Saint-Simon, comme elle aurait très-bien pu s’en donner le plaisir après le 24 février : aussitôt, et jusqu’à nouvelle organisation, la France, dépouillée, comme Samson par