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comme dans une trappe. Que signifient alors les victoires des Pyramides, du Mont-Thabor, etc. ? Qu’importe que Bonaparte se dédommage sur les Mamelouks, les Arabes, les Turcs, de l’irréparable revers d’Aboukir ? Il triomphe de la barbarie ; il est vaincu par la civilisation. Tous ces faits d’armes ne peuvent exercer d’influence que sur les imaginations folles des Français et des Orientaux : quant à l’entreprise, néant.

Le Système continental n’est qu’une variante de l’expédition d’Égypte. L’idée première n’appartient pas à l’Empereur : elle paraît, d’après Barère, être venue au Comité de salut public dans le feu de 93, et l’ignorance où l’on était généralement alors des lois de l’économie. Puisqu’on ne pouvait atteindre Pitt et l’Angleterre à travers l’Océan, il n’y avait, pensait-on, qu’à lui fermer l’Europe, et ses marchandises lui restant pour compte, l’Angleterre serait ruinée. Quelle folie !... Mais, pour garder l’Europe de la visite des Anglais, il eut fallu, sur l’immense étendue de ses côtes, une marine dix fois plus nombreuse que pour opérer chez eux une descente. Dans l’impossibilité de se procurer une pareille flotte, il ne restait de ressource, contre le commerce de ces insulaires, que l’abstention, volontaire ou forcée, du continent. Telle est la théorie du blocus continental. C’est à peu près comme si, pour ôter au gouvernement du 2 décembre la recette des impôts indirects, et le pousser plus vite à la banqueroute, les citoyens supprimaient de leur consommation le vin, la bière, les eaux-de-vie, le sel, le sucre, le tabac, etc. !... Si étrange que paraisse aujourd’hui l’idée, Bonaparte se charge de l’exécu-