Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 1, 1869.djvu/184

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ture, comme tous les autres droits, pacifique. Il n’implique pas nécessairement la guerre ; il ne la cherche pas. Loin de là, il proteste contre cette extrémité à laquelle les plus vaillants eux-mêmes redoutent toujours d’en venir.

Faisons abstraction des petits incidents, et attachons-nous seulement à la marche logique des choses. Les tribus, d’abord isolées, bientôt, à force de grossir, se rencontrent. Des rapports, non encore des droits ni des conventions, de simples rapports de voisinage s’établissent ; on fait des échanges ; puis, par la même raison qui faisait qu’en s’approchant on se rendait mutuellement service, il se trouve qu’on se gêne, et l’on s’aperçoit que l’indépendance première devient de jour en jour plus difficile, finalement qu’elle est impossible. Une fusion, ou une élimination, est inévitable.

Que va-t-il se passer ? L’homme tient à la liberté, autant, au moins, qu’il est enclin à l’association. Ce sentiment d’indépendance est bien plus fort encore dans les masses, tribus, cités, nations. Tout voisinage leur est suspect ; tout ce qui les engage et les lie, d’instinct elles le repoussent. Que sera-ce, s’il s’agit d’une incorporation qui menace d’engloutir leur individualité, leur autonomie, en un mot tout leur être ? Car l’être d’une nation, c’est l’indépendance, la souveraineté. Cependant les causes qui précipitent les deux tribus l’une vers l’autre ne s’arrêtent pas ; la situation devient urgente ; les deux fleuves s’approchent, on touche au moment où leurs eaux vont se confondre.

Ici, il est impossible de dire qu’il y ait tort d’aucun côté. Le droit est évidemment égal. La réunion pourrait s’opérer à l’amiable ; mais le cas est rare, attendu que la réunion emporte, pour l’une au moins des cités à réunir, quelquefois pour toutes deux, la perte de l’originalité. Les bourgs de l’Attique, en se réunissant sous la protection