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travail est inhérent au travail, comme le droit et le devoir, en général, sont inhérents à l’homme même.

Il y a un droit de l’amour, qui consiste, non pas seulement en ce que toute personne a droit d’aimer, et, si elle le peut, de se faire aimer ; mais en ce que l’amour, par sa nature, comporte chez les amants certaines obligations réciproques dont la violation implique la négation de l’amour même. Ce droit de l’amour, tous les peuples ont essayé d’en donner les formules, sous le titre de mariage.

Il y a un droit de l’ancienneté, qui veut qu’à mérite égal le plus long service obtienne la supériorité du grade. Pas plus que les précédents, ce droit n’est ni une concession du prince, ni une fiction du légiste ; il ressort, comme tous les autres, directement de la dignité humaine et du respect qui lui est dû, dans chacune de ses manifestations ou hypostases.

Ce n’est pas à dire, tout le monde le comprend, que droit et travail, droit et intelligence, droit et amour, droit et ancienneté, soient une seule et même chose. Il en résulterait que le travailleur, parce qu’il travaille, pourrait s’arroger toute espèce de privilége, comme faisait autrefois le noble parce qu’il était noble. La même chose arriverait du savant, de l’amoureux, du vétéran. Le droit, je le répète, dans sa signification la plus générale, est le respect auquel tout homme peut prétendre de la part de son semblable, tant pour sa personne que pour sa famille et sa propriété, en raison de leur communauté de nature et de la solidarité de leurs intérêts. Mais le droit se diversifie et se règle dans l’application, ici, en raison de la quantité et de la qualité du travail ; là, en raison de l’intelligence ; ailleurs, en raison des gages donnés ou promis, etc.

On comprend de même la différence qu’il y a entre le droit du travail et le droit au travail. Celui-ci découle du droit supérieur, absolu, de l’homme, dont l’existence ré-