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naire innombrable, là où auparavant on ne comptait pas un homme. Et pourquoi tout cet arbitraire, grand Dieu ? Dans quel but toutes ces violences ? À qui en avait-on ? Quel monstre, ennemi de la civilisation et de la société, pensait-on combattre ? La révolution de 1848, cette révolution qui ne se définissait seulement pas, savait-on si elle était dans le droit ou contre le droit ? Qui l’avait étudiée ? Qui pouvait, la main sur la conscience, l’accuser ? Déplorable hallucination ! Le parti révolutionnaire, sous le Gouvernement provisoire et la Commission exécutive, n’existait encore que dans l’air ; l’idée, sous ses formules mystiques, se cherchait encore. C’est la réaction qui, à force de déclamer contre le spectre, a fait de ce spectre un corps vivant, un géant qui, au premier geste, peut l’écraser. Ce que moi-même je ne concevais qu’à peine, avant les journées de juin, ce que je n’ai compris que depuis, jour par jour, et sous le feu de l’artillerie réactionnaire, j’ose maintenant l’affirmer avec certitude : la Révolution est définie ; elle se sait, elle est faite.

À présent, réacteurs, vous en êtes aux moyens héroïques. Vous avez poussé la violence jusqu’à l’odieux, l’arbitraire jusqu’au mensonge, l’abus de votre faculté législative jusqu’à la déloyauté. Vous avez prodigué le mépris et l’outrage, vous avez recherché la guerre civile et le sang. Tout cela a produit autant d’effet sur la révolution que des coups de flèches sur un hippopotame. Ceux qui ne vous haïssent pas vous méprisent : ils ont tort. Vous êtes d’honnêtes gens, remplis de tolérance et de philanthropie, animés d’excellentes intentions, mais dont l’esprit et la conscience sont sens dessus dessous. J’ignore ce qu’il vous plaira de résoudre, si vous continuerez de battre la charge sur la révolution, ou si, comme je le vois venir, vous