Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/36

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sept millions d’électeurs et l’armée, nous sommes sûrs de vaincre la révolution : et la religion, l’autorité, la famille, la propriété, sont sauvées.

Furent présents à cette consultation dix-sept notables ès sciences morales et politiques, consommés, disait-on, dans l’art de mater les révolutions et les révolutionnaires. L’ordonnance, présentée à l’Assemblée Législative, fut homologuée le 31 mai.

Par malheur il était impossible, dans l’espèce, de faire une loi de privilége qui fût en même temps une liste de suspects. La loi du 31 mai, frappant à tort et à travers et dans une proportion à peu près égale sur les socialistes et les conservateurs, ne servit qu’à irriter davantage la révolution, en rendant la réaction plus odieuse. Dans les sept millions d’électeurs conservés, quatre peuvent appartenir à la démocratie : ajoutez trois millions d’exclus mécontents, et vous aurez, au moins en ce qui regarde le droit électoral, la force relative de la révolution et de la contre-révolution. Aussi, voyez la misère ! ce sont justement les électeurs de l’ordre, en faveur desquels a été imaginée la loi du 31 mai, qui sont les premiers à la maudire ; ils l’accusent de tous leurs maux présents, et de ceux, bien plus grands, qu’ils redoutent pour l’avenir ; ils en demandent à grands cris, dans leurs journaux, le rappel. Et la meilleure raison de croire que cette loi ne sera jamais exécutée, c’est qu’elle est parfaitement inutile, le gouvernement ayant plus d’intérêt à s’y soustraire qu’à la défendre. Est-ce assez de mécomptes, assez de scandales ?

La réaction, depuis trois ans, a fait pousser la révolution comme en serre chaude. Elle a créé, par sa politique d’abord équivoque, puis louvoyante, enfin hautement absolutiste et terroriste, un parti révolution-