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au moment même où la Révolution prononce à la fois leur double déchéance.

Mais, ni l’Église, manquant de sanction politique, ne saurait conserver la direction des idées ; ni l’État, dépourvu de principes supérieurs, ne peut aspirer à la domination des intérêts ; quant à leur fusion, elle est encore plus chimérique que celle de la monarchie absolue avec la monarchie constitutionnelle. Ce que la liberté a disjoint, l’autorité ne le réunira pas.

Ma question subsiste donc tout entière : en vertu de quel droit l’État, indifférent aux idées et aux cultes, l’État, athée comme la loi, prétend-il administrer les intérêts ?

À cette question, toute de droit et de moralité, on oppose :

1o Que les citoyens et les communes, ne pouvant connaître des intérêts généraux, attendu qu’ils ne sauraient être d’accord, un arbitre souverain est nécessaire ;

2o Que les choses ne pouvant pas non plus aller d’ensemble, unitairement, si chaque localité, chaque compagnie, chaque groupe d’intérêts était abandonné à son inspiration propre, si les fonctionnaires publics recevaient autant d’ordres différents, contradictoires, qu’il y a d’intérêts particuliers, il est indispensable que l’impulsion parte d’un moteur unique, conséquemment que les fonctionnaires soient à la nomination du Gouvernement.

On ne sort pas de là : antagonisme inévitable, fatal, des intérêts, voilà le motif ; centralisation ordonnatrice et hiérarchique, voilà la conclusion.

C’est d’après ce raisonnement que nos pères, en 93, après avoir détruit le droit divin, le régime féodal, la distinction des classes, les justices seigneuriales, etc.,