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2. Élimination des fonctions gouvernementales. — Cultes.


L’ancienne révolution n’a point frappé le culte : elle s’est contentée de le menacer. Double faute, qui a été renouvelée de nos jours, et qui s’explique, à l’une et l’autre époque, par une arrière-pensée de réconciliation entre les deux puissances, temporelle et spirituelle.

L’ennemi est là, cependant. Dieu et le Roi, l’Église et l’État, telle est, en corps et en âme, l’éternelle contre-révolution. Le triomphe de la liberté, au moyen âge, fut de les séparer, et, ce qui montre l’imbécillité des deux pouvoirs, de leur faire accepter comme un dogme leur propre scission. Maintenant, nous pouvons l’avouer sans péril : devant la philosophie, cette distinction est inadmissible. Qui nie son roi nie son Dieu, et vice versâ, il n’y a guère que les républicains de la veille qui refusent de le comprendre. Mais, rendons cet hommage à nos ennemis, les jésuites le savent : aussi, tandis que depuis 89 les vrais révolutionnaires n’ont cessé de combattre et de ruiner l’un par l’autre l’Église et l’État, la sainte congrégation a toujours pensé à les réunir, comme si la foi pouvait refondre ce que la raison a divisé !

Ce fut Robespierre qui le premier, en 1794, donna le signal du retour de la société à Dieu. Ce misérable rhéteur, en qui l’âme de Calvin semblait revivre, et dont la vertu nous a fait plus de mal que tous les vices des Mirabeau, des Danton, des Dumouriez, des Barras, n’eut toute sa vie qu’une pensée, la restauration du Pouvoir et du Culte. Il se préparait tout doucement à cette grande œuvre, tantôt en envoyant de pauvres athées, d’innocents anarchistes, à la guillotine ; tantôt